Asile statutaire reconnu aux Palestiniens de Gaza

Depuis le 12 février 2024, les Palestiniens de Gaza pouvaient bénéficier de la protection subsidiaire du fait du conflit y sévissant (CNDA, 12 févr. 2024, n° 22054816). La Cour nationale du droit d’asile a étendu cette protection à l’asile statutaire le 11 juillet 2025 au bénéfice d’une habitante apatride de la bande de Gaza et de son fils qui ne bénéficiaient pas de la protection de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine (UNRWA) auprès duquel ils n’avaient jamais été enregistrés (CNDA, 11 juill. 2025, n° 24035619). Sur ce dernier point, la Cour juge quoi qu’il en soit que l’UNRWA n’est plus en mesure d’assurer une protection effective depuis le 7 octobre 2023 et permet aux résidents de Gaza de solliciter une protection, même s’ils ont été enregistrés auprès de cet organisme (CNDA, 13 sept. 2024, n° 23042517 et 23042541).

Dans l’affaire jugée le 11 juillet 2025, la Cour s’est fondée sur plusieurs sources d’informations, notamment des rapports du Comité spécial des Nations unies chargé d’enquêter sur les pratiques israéliennes depuis l’attaque du le 7 octobre 2023 par la branche armée du Hamas et des avis de la Cour internationale de justice. Pour justifier sa décision, la Cour a observé que 82,4 % de la bande de Gaza était sous contrôle militaire israélien et que l’armée israélienne recourait à des systèmes d’intelligence artificielle pour identifier des cibles, entraînant une augmentation du ratio entre personnes ciblées et victimes civiles (au 22 mars 2025, 55 647 morts, dont 8 304 femmes et 15 613 enfants, et 129 880 blessés). L’arrêt pointe également la destruction à grande échelle d’infrastructures essentielles à la population civile (89 % des installations d’eau et d’assainissement ; 62 % des centres de soins). Visant la résolution 12690 de l’assemblée générale des Nations unies du 12 juin 2025 condamnant l’« utilisation de la famine contre des civils comme arme de guerre » et tout « changement démographique ou territorial dans la bande de Gaza », la Cour en tire la conséquence que les forces armées israéliennes contrôlent une partie substantielle de la bande de Gaza et que les Palestiniens de Gaza subissent des méthodes de guerre créant notamment une insécurité alimentaire et une situation de famine.

Ces méthodes ont été jugées suffisamment graves du fait de leur nature et de leur caractère répété et ont été regardés comme des actes de persécution fondés sur la nationalité au sens et pour l’application de l’article 1er, A, 2 de la convention de Genève et de l’article 10 de la directive 2011/95/UE du 13 décembre 2011. La directive renvoie à « l’appartenance à un groupe soudé par son identité culturelle, ethnique ou linguistique, ses origines géographiques ou politiques communes, ou sa relation avec la population d’un autre État », une définition appliquée en 2021 aux Hazâras d’Afghanistan (CNDA, 5 nov. 2021, n° 20025121). La Cour s’est également appuyée sur l’ordonnance « Afrique du Sud c/ Israël » du 26 janvier 2024 de la Cour internationale de Justice qui a estimé « que les Palestiniens constituent un groupe national, ethnique, racial ou religieux distinct ». Un retour dans la bande de Gaza des requérants les exposant à une crainte d’être personnellement persécutés du fait de cette « nationalité », la requérante et son fils ont été admis à la qualité de réfugié pour des persécutions liées à une « nationalité »… alors même qu’ils sont reconnus comme apatrides.